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Carrefour du savoir Telfer

Innovation verte à l'international : repenser les échanges entre le Canada et l’Amérique latine


Un intervenant tenant un microphone se tient à l’arrière de la salle et s’adresse aux participants assis autour de lui. Des tableaux à feuilles mobiles et des murs en bois apparaissent à l’arrière-plan.

Une atmosphère de réflexion collective régnait dans la salle Alex Trebek belairdirect Hall, où se sont réunis des universitaires, des leaders de l’industrie et des partenaires du secteur public pour examiner une réalité qui s’impose : le système commercial international est en pleine transformation, et le Canada comme l’Amérique latine se retrouvent à un moment charnière. L’atelier, animé par le professeur Tommaso Ferretti de Telfer, s’est penché sur la manière dont la durabilité et la diversification des chaînes de valeur mondiales peuvent devenir des moteurs communs de résilience, alors que les repères économiques traditionnels semblent de plus en plus fragilisés.

Au cœur des échanges se trouvait la notion de « désordre mondial », un terme utilisé pour décrire la volatilité provoquée par les chocs tarifaires, les fractures géopolitiques et la redistribution des pouvoirs économiques.

Pour les entreprises canadiennes historiquement tournées vers les États-Unis, cette incertitude n’a plus rien de théorique. Comme l’a souligné le professeur Ferretti, « des relations qui tenaient depuis des décennies peuvent désormais changer en un seul cycle politique ». Pourtant, dans cette instabilité se cachent aussi de nouvelles possibilités.

Vue d’ensemble des participants assis à des tables rondes dans la salle Alex Trebek belairdirect, écoutant une présentatrice au podium. Une grande diapositive présentant une carte et des informations sur le commerce est projetée à l’avant de la salle.

Un thème central s’est rapidement imposé : l’Amérique latine n’est plus une option éloignée, mais un partenaire stratégique. Samantha Khoury, d’Investir au Canada, a observé une hausse marquée de l’intérêt d’investisseurs du Brésil, du Mexique et du Chili, rappelant que les incitatifs liés à la durabilité et la stabilité réglementaire attirent de plus en plus.

Elle a noté que si les États-Unis ont introduit une part d’incertitude, ils ont aussi « ouvert des portes auparavant négligées ». Son intervention a mis en lumière une évolution claire : diversifier n’est plus un risque, mais une stratégie de prudence.

Une intervenante se tient au podium pour s’adresser au public, avec des murs en bois et des participants attentifs visibles au premier plan.

La discussion s’est élargie grâce à la perspective de la professeure Keysa Mascena, de l’Université de Fortaleza, qui a présenté un exemple éloquent d’écosystème énergétique renouvelable ancré dans les réalités communautaires. Elle a décrit la transformation de l’État du Ceará, passé d’une région marquée par la rareté de l’eau à un pôle éolien, solaire, puis d’hydrogène vert, attirant plus d’une trentaine d’entreprises nationales et internationales. Son message le plus marquant : l’innovation doit être inclusive.

« Les acteurs peuvent être aveugles aux communautés qui vivent autour de la chaîne de valeur », a-t-elle rappelé, soulignant l’importance de la justice énergétique et de l’évaluation des retombées sociales. L’initiative Palma Solar, financée et gérée par les résidents eux-mêmes pour une production et une consommation locales, a illustré ce que signifie une durabilité vécue plutôt que revendiquée.

Un présentateur en complet s’exprime au podium sous le regard des participants. Une diapositive de l’agence de promotion de l’investissement étranger du Chili est partiellement visible au-dessus de lui.

Francisco Appelgren, d’InvestChile, a apporté un point de vue complémentaire en montrant comment la constance des politiques publiques peut accélérer le développement d’une capacité industrielle verte. La stratégie nationale du lithium, le vaste réseau d’accords commerciaux du Chili et des cibles claires en matière d’énergies renouvelables ont suscité une réflexion importante : comment un pays peut-il devenir un partenaire fiable pour atteindre la frontière technologique de l’économie verte? Cette perspective a soulevé une question implicite : comment le Canada pourrait-il s’inspirer de cette clarté stratégique pour orienter sa propre trajectoire de diversification?

Un présentateur à l’avant de la salle s’exprime au podium tandis qu’une diapositive sur le secteur du biométhane au Brésil est projetée derrière lui. Les participants sont assis à des tables rondes faisant face à la scène.

La conversation s’est ensuite tournée vers les défis concrets liés au passage du potentiel à l’action. Zachary Chrumka, d’Exportation et développement Canada, a mis en lumière le rôle essentiel des modèles de financement qui permettent aux entreprises d’accéder à de nouveaux marchés sans assumer des risques prohibitifs. Il a rappelé que des milliards ont déjà été investis pour appuyer la croissance des technologies propres. Cependant, le financement ne suffit pas : les institutions publiques jouent également un rôle crucial pour « identifier les entreprises étrangères les plus susceptibles de devenir des plateformes globales pour le développement de nouvelles chaînes d’approvisionnement et de nouveaux marchés verts », par exemple les biocarburants ou les alternatives biosourcées au plastique. Sélectionner ces partenaires est un processus long, rigoureux et fondé sur la preuve. La conclusion était claire : le potentiel pour arrimer la croissance canadienne aux chaînes de valeur vertes existe, mais un meilleur alignement avec les entreprises en expansion est nécessaire.

Une personne se tient au podium pour livrer ses remarques, tandis que les participants écoutent. Une diapositive d’Alcance Solutions est projetée au-dessus de la personne.

Un autre fil conducteur a émergé : celui de la commercialisation et de la culture d’affaires. Andrea Gardella, d’Alcance Solutions et de la Chambre de commerce Brésil-Canada, a décrit l’intérêt croissant des petites et moyennes entreprises brésiliennes pour le marché canadien, et l’intérêt inverse des PME canadiennes pour l’Amérique latine. Elle a toutefois insisté sur le fait que la réussite exige plus que la technologie : elle repose sur des compétences juridiques, culturelles et relationnelles, et sur la capacité d’intégrer les lacunes en expertise propres aux PME. Selon elle, le Canada excelle dans le développement de technologies, mais peine à les commercialiser.

Elle a suggéré des politiques favorisant l’adoption transfrontalière précoce et un renforcement des liens entre acteurs et institutions de soutien. Comme elle l’a résumé : « Il n’est pas toujours nécessaire d’ajouter de nouveaux incitatifs; il suffit parfois de les simplifier. »

Ken Bradley, président du conseil et chef de la stratégie chez Lytica, a ensuite mis de l’avant la vitesse croissante et l’importance des données dans la conception des produits, la sélection des fournisseurs et l’adoption technologique dans les chaînes de valeur mondiales des composants électroniques. Ces tendances rendent la compétition plus difficile pour les entreprises qui doivent évoluer face à de grands acteurs et à des adopteurs rapides de nouvelles technologies. Elles posent aussi des défis pour intégrer la durabilité « dès la conception », tout en répondant à des exigences de diligence raisonnable de plus en plus complexes. Pour lui, l’innovation et la confiance construite avec les partenaires et leurs parties prenantes représentent une voie essentielle pour surmonter ces défis.

Enfin, Arianna Bondi, doctorante en science politique à l’Université McGill, a présenté un projet de recherche international visant à éclairer plusieurs des enjeux soulevés durant l’atelier. Le projet s’appuie sur son expertise méthodologique et sa connaissance approfondie des chaînes de valeur mondiales, ainsi que sur une équipe rassemblant des chercheurs du Canada, du Brésil, de l’Argentine et du Chili. Mme Bondi a noté que les entreprises d’Amérique latine et du Canada doivent désormais composer simultanément avec des pressions de rentabilité, des objectifs de durabilité et un « désordre mondial » accentué par des chocs géopolitiques comme les tarifs américains. L’étude à venir, menée auprès d’entreprises de quatre pays, cherchera à comprendre comment ces chocs influencent l’équilibre entre profit et durabilité.

Un participant prend la parole en tenant un microphone et en gesticulant de la main pendant la discussion. Un autre participant est assis à côté de lui, l’écoutant attentivement.

Ce qui a rendu cet atelier particulièrement riche n’était pas l’atteinte d’un consensus, mais la convergence des perspectives. Une reconnaissance partagée s’est dégagée : la diversification commerciale, la durabilité et l’innovation ne forment plus des conversations parallèles, mais un cadre commun. Les participants ont souligné l’importance de donner une place centrale aux impacts communautaires et la nécessité d’une collaboration accrue entre milieux universitaire, public et industriel. En conclusion, le professeur Ferretti a rappelé que si les anciennes certitudes sur le commerce mondial s’effritent, une occasion s’ouvre pour repenser la façon dont les économies se connectent, dont les industries évoluent et dont la responsabilité environnementale peut devenir un atout stratégique plutôt qu’une contrainte.

À un moment où le monde semble fragmenté, cet atelier a rappelé que des ponts peuvent encore être construits et que la durabilité peut en constituer l’un des fondements les plus solides.

Nous remercions chaleureusement tous les participants, et plus particulièrement Samantha Khoury (Investir au Canada), la professeure Keysa Mascena (Université de Fortaleza), Zachary Chrumka (Exportation et développement Canada), Andrea Gardella (Alcance Solutions; Chambre de commerce Brésil-Canada), Ken Bradley (Lytica Inc.) et Arianna Bondi (Université McGill) pour la richesse de leurs contributions. Enfin, nous soulignons le rôle essentiel du professeur Tommaso Ferretti (École de gestion Telfer), dont l’initiative et l’animation ont donné vie à ce dialogue éclairant.

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Takwa Youssef

Cet article fut rédigé par Takwa Youssef, coordonnatrice de l'Académie verte à Telfer.

En tant que coordonnatrice de l'Académie verte, Takwa joue un rôle clé dans le soutien à la mise en œuvre des programmes interdisciplinaires de l’académie. Elle supervise la logistique, la coordination des événements et la gestion des ressources, assurant l'exécution réussie des cours, ateliers, formations et recherches. Takwa établit des ponts entre les facultés, les services et les partenaires externes, cultivant la collaboration pour enrichir l'impact du programme. Elle gère la communication, les finances et l’administration, tout en contribuant à la vision à long terme de l’académie en renforçant les liens entre les disciplines et en soutenant sa croissance continue.

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