C’est le milieu de l’hiver à Las Vegas, il fait beau et chaud, et le diplômé de l’École de gestion Telfer Rémon Boulerice (B.Com. 1995) et Véronic DiCaire sont sur une belle lancée. Céline Dion est à l’affiche au Caesar’s Palace et, juste en face, au Bally’s Casino, on annonce « Veronic : Voices ». Les spectacles de Véronic DiCaire, qui imite à la perfection une cinquantaine de chanteuses, dont Édith Piaf, Adele et Céline Dion, se donnent à guichet fermé depuis le début des représentations à l’été 2013.
 
À Gatineau, les billets de ses spectacles au Casino du Lac-Leamy en février dernier se sont envolés en dix minutes, et les supplémentaires à la Salle Odyssée ont affiché complet en moins de sept minutes.
 
Il y a dix ans, Véronic DiCaire imitait des chanteuses uniquement pour faire rire les gens en studio entre les prises de son, avec son groupe de l’époque, Sens Unique. Avec l’aide de son conjoint, du couple Céline Dion-René Angélil et du beau-fils de ce dernier – aussi imitateur à une certaine époque – le chanteur québécois Marc Dupré, la fille à la grande voix de la petite ville d’Embrun, en Ontario, est devenue une célébrité internationale.
 
Rémon Boulerice a rencontré Véronique adolescente à la patinoire de Casselman, son village natal, près d’Ottawa. Il avait alors 21 ans et il étudiait le marketing et la gestion des ressources humaines à l’Université d’Ottawa. Un jour où il arbitrait un match de hockey, lui qui rêvait d’une carrière comme arbitre dans la LNH, il a remarqué une fille dans les estrades. « Elle était venue encourager son frère, dit-il. Elle criait après les arbitres et elle portait le blouson blanc d’une pièce dans laquelle j’avais déjà joué. » En rentrant chez lui en voiture, il se souvient d’avoir croisé l’auto de la famille DiCaire, qui lui a signifié clairement qu’elle n’avait pas trop apprécié son travail. « Je me souviens de ce jour-là comme si c’était hier, et elle aussi. À peine quelques mois plus tard, je produisais mon premier spectacle local, et bien sûr, elle en faisait partie. C’est comme ça qu’on s’est rencontrés, et on est ensemble depuis ce temps-là. »
 
Au début, il s’occupait de la carrière musicale de Véronic simplement parce que c’était sa copine. « J’étudiais à l’Université d’Ottawa, et elle chantait dans un groupe. Notre entente initiale, c’était que je m’occupais de sa carrière jusqu’à ce qu’elle trouve quelqu’un d’autre qui le ferait mieux que moi. Je pense que Véronic est devenue une artiste et a appris les rouages de son métier en même temps que je suis devenu gérant et que j’ai appris les rouages du mien. Nous avons évolué ensemble, et c’est devenu une formule gagnante. »
 
On dit qu’il faut des années pour remporter un succès instantané. En 2007, Marc Dupré aidait Véronic à produire son troisième album – sur lequel elle chantait avec « sa propre voix ». Ils se sont mis à faire des imitations ensemble pour s’amuser. C’est alors que Marc a proposé à Rémon d’envoyer une démo à ses beaux-parents, Céline et René, qui ont tous deux adoré, en particulier l’imitation de Céline. En 2008, Véronic obtenait un contrat pour la première partie des concerts de Céline au Centre Bell à Montréal.
 
D’habitude, l’artiste qui assure la première partie livre son spectacle pendant que les spectateurs prennent place pour voir la vedette principale, mais cette fois-là, c’était différent. « L’équipe de Céline n’en revenait pas : "C’est incroyable, disaient-ils, il est 20 h et tout le monde est arrivé pour voir Véronic!" » Le troisième soir, en présence d’une équipe de TVA venue tourner un documentaire, 23 000 spectateurs ont réservé à Véronic DiCaire une interminable ovation. Sur la scène, Véronic était en larmes, mais il lui restait une chanson à livrer. « Je suis toujours sur le côté de la scène et j’essayais d’établir un contact visuel, pour l’aider à se concentrer, raconte le mari-gérant. Mais c’est une pro et elle a chanté sa dernière chanson sans aide. Quand on a revu ce moment dans le documentaire, on en a eu des frissons. »
 
Rémon Boulerice affirme qu’il utilise toujours les compétences en marketing et en ressources humaines acquises à l’Université d’Ottawa. « Oh oui, en tout temps. Je comprends ce que veut dire vendre un produit. Il faut d’abord le définir et lui trouver le bon marché. Ça prend beaucoup de connaissances en ressources humaines pour y arriver. Pour survivre à trois mois de tournée en autocar, il faut aussi être en mesure de gérer tous les problèmes liés à une telle proximité. » Aujourd’hui, mari et femme se sont entendus pour séparer travail et vie personnelle. « Je ne peux plus apporter mon ordinateur au lit, dit-il en riant. Je pose toujours des questions et je travaille, et pour elle, c’est une zone dans laquelle il ne faut pas entrer. Mais nous parlons beaucoup affaires en auto, ce qui nous permet de nous concentrer sur la vie personnelle quand nous faisons autre chose entre amis. »
 
Si le couple Boulerice-DiCaire commence à considérer Las Vegas comme un second chez-soi, il possède un terrain de quatre acres à Morin-Heights, dans les Laurentides. « C’est en pleine forêt. Nous avons besoin d’un endroit pour décrocher. Véronic aime la nature, elle aime jardiner, et nous aimons faire ça nous-mêmes parce que ça nous aide à revenir à l’essentiel. » Rémond est particulièrement fier de son tracteur John Deere : « J’ai un faible pour les gros jouets. Je peux déterrer de grosses pierres avec ça ou tirer des arbres entiers. Les souffleuses, les barbecues et les tracteurs, j’adore! »
 
Quelle est la clé du succès de cette combinaison mari/gérant-femme/vedette? « Véronic a une grande intelligence émotionnelle. Mes connaissances l’ont toujours impressionnée, mais moi j’ai toujours été émerveillé par sa capacité de communiquer ses émotions. Nous nous complétons de cette façon, et c’est pour ça que nous sommes ensemble. »