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Pour une formation en entrepreneuriat plus inclusive

Co-rédigé par Barbara Orser, professeure émérite, et Catherine Elliott, professeure retraitée, toutes deux de l'École de gestion Telfer, ainsi que co-créatrices du tableau de bord EFPE + (Éducation et formation à l’entrepreneuriat plus sensible au genre). Cet article est republié de La Conversation sous licence Creative Commons. Lisez l'article original en anglais, publié le 5 février 2024.
Trois personnes portent attention à une personne qui tient un document

Les organisations qui offrent du soutien aux entrepreneuses et entrepreneurs oublient souvent qu’elles contribuent à renforcer le stéréotype de l’entrepreneur masculin, blanc et centré sur les technologies.

Partout dans le monde, les femmes ont moins de chances que les hommes de recevoir une formation en entrepreneuriat, particulièrement dans les programmes pour les entreprises en forte croissance. Et même les programmes qui appliquent les principes de l’inclusion en tenant compte du sexe ne tiennent pas compte d’autres facteurs identitaires comme l’âge, l’ethnicité ou la race.

Sous l’angle du développement économique, il importe que les programmes de formation en entrepreneuriat soient efficaces et inclusifs, car les jeunes entreprises sont les plus créatrices d’emploi.

La formation en entrepreneuriat est associée à des intentions entrepreneuriales, à l’inspiration, à la tolérance à l’ambiguïté et aux jeunes entreprises. Or, de nombreuses personnes travailleront à leur compte au cours de leur carrière. La formation en entrepreneuriat est donc l’affaire de tout le monde.

Notre étude vise à fournir aux formatrices et formateurs en entrepreneuriat des ressources efficaces pour reconnaître les préjugés présents dans leurs programmes afin d’éliminer des obstacles.

Un cadre d’analyse des obstacles

Notre étude est une collaboration internationale à laquelle ont participé Anita Shankar, anthropologue médicale, qui a analysé les résultats des interventions psychosociales dans les régions pauvres en ressources de l’hémisphère Sud, Candida Brush, professeure en entrepreneuriat, et Amanda Elam, sociologue et chercheuse-boursière dans le domaine du genre et de l’entrepreneuriat.

Nous avons établi un cadre et des outils pour intégrer l’inclusion dans la formation en entrepreneuriat, regroupés dans un rapport intitulé Éducation et formation à l’entrepreneuriat plus sensible au genre (EFESG+) 2.0. Le signe « plus » (+) fait référence à d’autres facteurs identitaires intersectionnels qui s’ajoutent au genre (race, ethnicité, religion, âge, niveau d’instruction, orientation sexuelle, culture, revenus, langue et handicap physique ou mental, etc.).

Le rapport renferme également les leçons tirées d’une revue systématique de la littérature sur la formation en entrepreneuriat et met en relief les obstacles dans les programmes pour les personnes marginalisées et sous-représentées.

Les préjugés dans l’enseignement

A person seen with a microphone
La plupart des étudiantes et étudiants sont incapables de nommer des personnalités entrepreneuriales dans leur pays, encore moins des femmes. (Henri Mathieu-Saint-Laurent)





 
Le milieu de la recherche appelle à un examen critique de l’enseignement et de la formation en entrepreneuriat.

La présence de préjugés dans les programmes d’études en entrepreneuriat est attestée, notamment dans des études menées à l’École de gestion Telfer de l’Université d’Ottawa.

Peu importe où ils se trouvent dans le monde, quand on leur demande de citer le nom d’une célèbre figure entrepreneuriale, les étudiantes et étudiants nomment une icône masculine des technologies aux États-Unis. La plupart sont incapables de nommer des personnalités entrepreneuriales dans leur pays, encore moins des femmes.

L’EDI dans l’enseignement en entrepreneuriat dans 19 pays

Notre équipe de recherche a constaté l’absence de politiques et de critères associés à l’équité, la diversité et l’inclusion (EDI) dans les programmes d’études et de formation en entrepreneuriat.

Nous avons également appris qu’une grande partie du corps enseignant cherche de l’aide pour améliorer l’inclusion dans les programmes, mais tout le monde n’a pas la même vision de l’inclusion et de la diversité.

Nous avons demandé à un panel d’enseignantes et enseignants en entrepreneuriat de 19 pays de se pencher sur leurs programmes et de répondre à quelques questions :

  • Le programme est-il suffisamment inclusif?
  • Quelle est votre perception quant à la nécessité du changement?
  • Quels sont les obstacles liés à la culture, au genre et aux identités entrepreneuriales, et quels indicateurs caractérisent un programme inclusif?

La première des trois enquêtes en ligne comprenait des questions sur les difficultés liées à l’inscription et à la participation de personnes appartenant à des groupes marginalisés ou sous-représentés.

Certaines personnes ne relevaient aucun problème, mais d’autres citaient plusieurs obstacles dans les processus, le contenu du programme et les résultats. Nous avons constaté que la délimitation entre ce qui est considéré ou non comme un groupe sous-représenté dans la formation en entrepreneuriat est fonction du contexte. Ainsi, en Argentine, on considère les personnes à faible revenu comme « les plus marginalisées au pays ». Aux États-Unis, c’est plutôt l’ethnicité qu’on désigne comme cause de marginalisation, tandis qu’en Allemagne, on pointe la langue des programmes comme un facteur d’exclusion des personnes migrantes.

Dans l’ensemble, on peut conclure de l’étude que les initiatives d’EDI restent généralement absentes des programmes de formation en entrepreneuriat.

Plusieurs panélistes ont mis en garde contre la tendance à considérer que les groupes sont homogènes, que tous leurs membres sont semblables.

Le cadre

Le rapport et ses outils aident les formatrices et formateurs à évaluer sept aspects du contenu de leurs programmes : l’engagement à offrir une formation inclusive, les connaissances et l’expertise en matière d’EDI, l’accès aux ressources, et la conception, l’élaboration, la prestation et l’évaluation du programme.

Chaque élément du cadre a été mis à l’essai dans des établissements aux États-Unis et au Canada.

Toutes les organisations ont utilisé les outils pour évaluer leurs programmes et constater les manques en matière de services ou d’inclusion. Certaines les ont trouvés utiles pour légitimer leurs efforts en matière d’EDI auprès de la direction et des bailleurs de fonds.

Une conception et des objectifs communs

Les formatrices et formateurs de grandes organisations ont insisté sur l’intérêt d’engager des spécialistes en EDI dans le cadre d’ateliers et de discussions en équipe, et ont établi une conception commune des questions d’équité et d’inclusion dans la formation en entrepreneuriat.

Dans certaines organisations, les processus d’évaluation ont resserré les liens entre les membres de l’équipe et entraîné des modifications au programme.

Certains programmes en entrepreneuriat énoncent les connaissances et l’expertise requises (comme l’embauche de formatrices et formateurs ayant de l’expérience auprès de groupes sous-représentés) et précisent les ressources et le leadership nécessaires à la réforme.

Vous pouvez télécharger le rapport comprenant les outils, le cadre et les critères d’évaluation sur le site de l’Université d’Ottawa.