La criminalité dans les finances décentralisées : quelles solutions?
La cybermonnaie occupe une place de plus en plus grande dans notre société moderne. On en parle même comme de l’avenir des finances. Mais de quoi s’agit-il au juste? Eh bien, la cybermonnaie est simplement de l’argent qui n’existe qu’en ligne, jamais sous forme physique. Elle est d’ailleurs à la base d’un nouveau type de système financier qui gagne rapidement en popularité : les finances décentralisées (FiDé).
Les FiDé sont en voie de révolutionner le milieu des finances. Contrairement aux institutions financières classiques, les FiDé misent sur les services entre particuliers en substituant aux médiateurs financiers la technologie et l’innovation. En gros, ce système vise à faciliter l’accès financier en éliminant le recours à un médiateur. Bref, à remplacer les institutions traditionnelles centralisées de manière à ce que les consommatrices et consommateurs soient maîtres de leurs finances.
Cela dit, les finances décentralisées ne sont pas exemptes de risques : leurs qualités mêmes ouvrent grand la porte à la criminalité en col blanc. Des personnes mal intentionnées peuvent exploiter les fonctions destinées à protéger la confidentialité d’utilisation afin de dissimuler leur identité, par exemple. Et comme elles sont décentralisées, il n’existe aucune autorité centrale vers laquelle se tourner pour signaler les activités criminelles.
Des pistes de solutions
Le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada vient de décerner à la professeure Qianru Qi une subvention d’engagement partenarial pour étudier les FiDé et trouver des moyens de contrer la criminalité afin de protéger les consommatrices et consommateurs. En partenariat avec des spécialistes en finances du Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE), la professeure Qi s’emploiera à créer des algorithmes pour détecter la criminalité financière et améliorer la sécurité des FiDé. Plus précisément, elle espère répondre à deux questions :
- Comment détecter automatiquement l’usage illicite des plateformes de FiDé?
- Comment déployer les algorithmes sur ces plateformes en tenant compte de la décentralisation de la réglementation?
L’organisme partenaire
Le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières (CANAFE), le service de renseignement financier du Canada, a pour mandat de prévenir le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et toute menace financière pour la sécurité nationale. À cette fin, le Centre analyse les déclarations d’opérations financières et fait part de ses constatations aux organismes d’application de la loi concernés en vue de protéger la confidentialité des renseignements financiers personnels et la sécurité au pays.
Prévention du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme
Le projet de la professeure Qi contribuera à la recherche sur la prévention du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme ainsi qu’à l’état des connaissances sur les FiDé, un domaine encore largement inexploré. En fait, il pourrait jeter une lumière nouvelle sur de nombreux aspects essentiels de la sécurité et de la liberté financières des Canadiennes et Canadiens.
Ces travaux produiront non seulement des retombées d’ordre théorique, mais ils pourraient également mettre au jour de nouveaux moyens de prévenir la criminalité financière et de réduire les risques liés à l’utilisation des FiDé. Enfin, ils pourraient aider une nouvelle génération de talents en technologie financière à mieux comprendre les risques et les obligations qui accompagnent l’utilisation des FiDé et, par conséquent, à améliorer la sécurité du système financier dans son ensemble.
Un partenariat avantageux tant pour le milieu de la recherche que pour la formation de premier cycle et des cycles supérieurs
Nous avons demandé à Tian Bo Zhang, un ancien étudiant de premier cycle à l’École Telfer qui travaille à ce projet, ce qui le motive à y participer. « Ce projet m’intéresse parce que je suis encore novice en recherche et qu’il m’offre la possibilité d’assimiler du contenu très pointu sous la direction d’une équipe chevronnée et de travailler avec des outils répandus dans l’industrie, comme Google BigQuery et ChainAnalysis Reactor. Je suis très heureux d’avoir l’occasion d’expérimenter la démarche scientifique. Le bagage que je suis en train d’acquérir m’aidera à atteindre mon rêve d’une carrière universitaire en droit. »
Nous avons également demandé à Sama Sedaghat, une étudiante en finances à la maîtrise à Telfer qui prend également part à cette étude, ce qu’elle espère retirer de cette expérience. « J’apprends à coder des contrats intelligents avec Solidity et à aiguiser mon sens critique, deux compétences essentielles pour résoudre des problèmes de cybersécurité complexes. J’ai également acquis un savoir-faire dans l’ingénierie de commande et l’utilisation de l’interface de GPT3, ce qui me permet d’interagir avec Chat GPT de manière professionnelle et efficace. »