La professeure Qiu Chen vient de publier les résultats d’une étude sur un problème important de transparence dans le secteur sans but lucratif (SBL) : afin d’accroître les occasions de dons, certains dirigeants déclarent de manière erronée les fonds amassés ou des dépenses administratives, en les comptabilisant en tant que dépenses de programme.
La professeure Chen a étudié ce qui advient du rôle de surveillance du conseil d’administration (CA) dans de telles situations. Elle a observé que lorsque les organismes sans but lucratif (OSBL) ne sont pas rentables, les administrateurs « comprennent que leur devoir fiduciaire consiste à la fois à surveiller les dirigeants et à collaborer avec eux pour amasser des fonds. Dans de telles circonstances, les administrateurs se trouvent à compromettre leur rôle de surveillance afin d’aider les dirigeants à impressionner les donateurs », indique la professeure Chen, professeure adjointe en comptabilité et boursière CPA Ontario.
En 2009, lorsque la professeure Chen a commencé son doctorat à l’Université Queen’s, des préoccupations avaient déjà été exprimées au sujet de la transparence dans le secteur SBL, mais les recherches étaient assez limitées. En réponse à des scandales comptables très médiatisés, les recherches universitaires sur le secteur s’étaient développées au moment où la professeure Chen a terminé son doctorat en 2011. L’année suivante, l’American Accounting Association a lancé un journal consacré à la comptabilité pour le gouvernement et les OSBL. L’industrie en était arrivée à une étape cruciale dans l’étude d’un large éventail de questions liées à la comptabilité : la responsabilité sociale, les normes de comptabilité, les activités politiques et la vérification, tous des domaines d’intérêt de la professeure Chen dans ses recherches.
L’augmentation de l’intérêt pour les OSBL est fort bien accueillie, étant donné le vieux mythe selon lequel les OSBL sont petits et valent moins la peine d’être étudiés que les entreprises du secteur privé, mentionne la professeure Chen, qui indique que « cette affirmation n’est pas fondée, puisqu’un grand nombre d’organismes caritatifs, dont plusieurs ont leur siège social à Ottawa, sont de taille considérable ». Les enjeux relatifs à la qualité de la comptabilité ne semblent pas « plus présents dans le secteur privé que dans le secteur SBL ». Cependant, les enjeux« sont soulevés dans des contextes très différents, où les objectifs caritatifs et les attentes des donateurs sont d’importants facteurs qui stimulent la motivation et le comportement des gens, et ce, d’une manière qui n’est pas toujours optimale ».
La professeure Chen a mené une expérience auprès de 189 membres de conseils d’administration d’OSBL. Elle indique que deux facteurs pouvaient avoir une incidence sur le rôle de surveillance des administrateurs : la méthode d’évaluation qu’utilisent les donateurs et le degré de transparence de la déclaration des dépenses des organismes. Lorsque les donateurs adoptent une méthode plus équilibrée pour évaluer l’organisation, cette méthode étant centrée à la fois sur le rendement financier et sur le rendement non financier, les administrateurs effectuent une surveillance moins rigoureuse. « Cependant, une plus grande transparence dans la déclaration des dépenses augmente cette surveillance. Cela semble réduire la tendance à accepter les déclarations erronées de dépenses faites par les dirigeants », explique la professeure Chen.
Une évaluation équilibrée faite par les donateurs est généralement préférable à une évaluation axée sur les finances. D’autre part, les évaluations équilibrées n’encouragent pas les administrateurs à réduire le nombre de déclarations erronées des dépenses dans le secteur SBL. En outre, la divulgation transparente des dépenses dans les états financiers d’OSBL renforce la surveillance faite par l’administration, contrairement à ce qu’ont allégué certains observateurs. Les répercussions sont claires pour les décideurs : « la déclaration transparente des dépenses devrait probablement être obligatoire, plutôt que volontaire ».